« Je suis née dans un Tardis.
Drôle d'endroit pour commencer une vie, non ? De toute façon, je ne m'en souviens pas. Mes premiers souvenirs remontent à l'âge de cinq ans, ce jour où j'ai eu le droit de reprendre du gâteau au chocolat trois fois. Quoi de plus chouette que de commencer sa vie dans un Tardis vous me demandez ? En mangeant le gâteau au chocolat de ma mère. Alors je ne me plains pas ! Il est très bon !
Mais commençons plus sérieusement. Jamais mes parents ne m'ont caché mon adoption. Petite, je ne me posais pas de questions. Maman était maman, et papa, papa. C'est lorsque les boutons apparurent et que mes hormones furent en ébullition, et un soir ou la vie était particulièrement injuste, parce que Grégoire ne pouvait dormir chez moi, que je hurlais pour la première fois « de toute façon z'êtes pas mes parents !! » La bombe était lâchée.
J'ai grandit sur Nouvelle Terre, à New New York, dans un cadre propice à l'épanouissement personnel, sans jamais rencontrer le moindre problème. Mais mon adolescence, période de questionnement et de remise en cause incessante fut aussi le début de mon manque.
Seul indice :
un bracelet portant les inscriptions "17-01-2015, Eden Gaia" ainsi qu'une suite de symboles impossibles à comprendre. Cela ne m'aidait pas beaucoup, mais je gardais la gourmette comme un trésor.
C'est vers mes quinze ans que je commençais à ressentir le besoin de comprendre d'où je venais, et surtout savoir pourquoi mes véritables parents n'avaient pas voulus de moi. Je questionnais beaucoup ma famille adoptive, mais malheureusement, elle n'en savait pas plus que moi. Cependant, elle décrivait ma mère comme une grande femme blonde, très belle, à l'allure princière et au visage doux. Elle disait que je lui ressemblait beaucoup. Je perdais des heures à imaginer ma vie ailleurs, avec elle. Était-elle une reine, étais-je le fruit d'un amour impossible ? C'est ce qui me paraissait le plus vraisemblable. Mais où ? Jamais sur internet ou dans les livres je réussit à retrouver trace de cette femme.
Le temps passait, et je devenais libraire. Malgré la technologie de pointe, jamais les humains ou les extraterrestres ne pouvaient se résoudre à oublier les livres de papier. Pour mon plus grand bonheur.
À l'âge de cinquante ans, je rencontrais un homme, différent des autres. Nous avons vécu ensemble très vite, et profitions de notre jeunesse pour nous amuser ensemble. Il était infirmier et de quarante ans mon ainé. Mais sur Nouvelle Terre, cela ne fait pas une grande différence... Mes parents étaient heureux de me voir oublier mes angoisses.
Car depuis longtemps, j'ai peur d'être abandonnée, comme ma vraie mère l'a fait. Être avec mon amour me faisait oublier cette histoire, et me rendais heureuse d'être là-bas, en vie.
Nous avons fini par avoir un bébé, peu après mes 90 ans. Je sais que c'est jeune, mais je veux vite combler ce manque. C'est une petite fille, blonde elle aussi. Comme elle me ressemblait...
Pourtant, voir ma fille est une joie immense et une peine infinie. Je repensais à ma mère, la maudissait de m'avoir abandonné. Jamais je ne pourrais être aussi lâche. Être mère à mon tour fit se rouvrir le vide, le manque en moi. Plus grand, plus profond, plus douloureux. Je reprenais mes recherches, mais cette fois, pas question de rester sage. La maternité m'avait donné des ailes, je me sentais invincible.
C'est pour cela que je ne m'étais pas méfiée, le matin ou cet homme est venu me dire qu'il avait les réponses à mes questions.
À bientôt 91 ans, je pensais avoir suffisamment vécue pour ne pas me faire avoir.
J'ai été bien naïve.
Une minute plus tard, dans une petite ruelle, j'étais morte. Je ne me souviens pas des détails. Juste que j'ai été surprise, puis étonnée. Au lieu de sentir le noir, l'engourdissement venir, comme le disent les livres, ce fut une explosion intense de lumière et d'énergie qui vint à moi. Enfin, de moi.
Lorsque je repris mes esprits, j'étais différente... Tellement différente que je ne suis jamais rentrée chez moi. Honteuse de ce que j'étais devenue. Je repris mon nom de jeune fille, me présentant comme était « Ed' » ou « Eddie » aux curieux. Je cachais absolument mon ancienne vie, et j'appris qu'un enterrement eut lieu, ma famille me croyant morte ou disparue à jamais.
Je suis allée voir ma tombe.
Mais ces nouveaux indices, malgré mon malheur, m'ont permis de trouver très vite ce que j'étais en réalité : un seigneur du temps. Ou plutôt, une demi, une bâtarde, en somme. Un seul cœur, ce n'est pas suffisant pour l'être entièrement !
À partir de ce jour, ce fut plus simple. Jouissant d'un nouveau statut et indices, ainsi que d'une nouvelle identité, j'étais devenue plus intrépide et plus égoïste. Me procurer un manipulateur de vortex fut simple, et rapidement, j'eu assez d'argent pour commencer à envisager de sérieux voyages, grâce à un almanach des sports et ''beaucoup de chance'' aux jeux.
N'ayant aucune information sur mon père, je comprenais que ma mère était la seigneur du temps. Mais comment retrouver une personne en dehors du temps ? J'en déduis simplement que je devais me rendre là où j'étais sure de la voir : le jour où elle m'abandonna à mes parents.
C'est ici que mon histoire a vraiment commencé. »